Le bon, la brute et le truand
Le bon, la brute et le truand est un western spaghetti bien connu réalisé par Sergio Leone en 1966.
Ou faut-il vraiment liquider ses symptômes ?
Nous sommes multiples et toute la difficulté de l’existence est de faire vivre ensemble toutes ces facettes de nous en harmonie, et sans en rejeter aucune. Le problème posé à un très grand nombre de mes clients est de faire cohabiter des parties opposées, antagonistes et qui transforment leur vie intérieure en western. Surtout que si le bon et le truand sont assez bien identifiés, la brute se planque souvent dans l’ombre. Ca peut défourailler sévère !
Le Bon consulte
C’est en général Le Bon qui va prendre rendez-vous et venir à une première consultation. Son objectif : faire la peau au Truand qui lui pourrit l’existence.
Le Bon m’explique que Le Truand mange ou boit plus que de raison, qu’il fume comme un pompier, trompe son conjoint, parfois sans se protéger, ou bien se débrouille pour échapper à toutes des obligations. Le Truand est faignant, menteur, obèse ou bien anorexique, à moins qu’il ne soit addict à la coke ou dépense sans compter dans des paris en ligne ou des sites de ventes privées. Parfois, il passe des heures sur des sites pornographiques de plus en plus trashs, ou pique des colères et casse tout ce qui lui tombe sous la main. Il peut aussi être un horrible traitre : il débande ou éjacule précocement, il afflige Le Bon de vaginisme ou d’alopécie. Et Le Bon est angoissé, il se sent désespéré par Le Truand qui semble contrôler sa vie.
Le Bon compte sur moi (et de façon générale sur le thérapeute) pour dire son fait au Truand. Il cherche un allié dans son entreprise de normalisation du trublion. Au trou Le Truand ! Au cimetière des mauvais souvenirs ! Grâce au psy qui va mettre de l’ordre et expliquer les choses au Truand, peut-être même lui donner des travaux d’intérêt général (appelé « exercices » pour paraître bienveillant) pour se réformer. Les TCC fonctionnent assez souvent sur ce schéma.
Le Truand s’en moque comme de sa première cartouche
Dans le meilleur des cas, il ne se sent pas concerné. Dans le pire, il va se rebeller et truander de plus belle.
Le Truand est un malin, et il sait bien que tout l’équilibre repose sur lui. Car Le Truand n’est pas là pour rien.
Gilles(1) vient me consulter parce que son truand trompe d’abondance sa compagne. Il voudrait être fidèle, honnête, fonder une petite famille équilibrée. Mais il se retrouve à tirer sur tout ce qui bouge. Il ment, il dépense un pognon de dingue avec ces filles dont il ne se souvient parfois même pas du prénom. Le Bon est honteux. Mais le sourire du Truand affleure quand il parle des prénoms oubliés, ou des bouteilles commandées par deux ou trois dans les saloons à entraîneuses.
Un jour, Gilles dessine Le Truand : des pièces d’or tombent dans son coffre depuis une manne céleste, des filles à ses pieds sont prêtes à lui faire tout ce qu’il veut. Il lui dessine un sceptre et une couronne. Il lui donne un nom : L’empereur.
Depuis tout petit, Gilles s’est senti exploité, annihilé. Il a dû se soumettre à la volonté et à l’arbitraire des autres, y compris sexuellement. Le Truand vient rétablir l’équilibre : dans ces épisodes de débauche, Gilles est « comme un dieu ».
La Brute attend son heure dans l’ombre
La Brute est… brute. Comme on le dirait d’un diamant non taillé, d’une énergie non domptée.
Imaginez le petit Gilles. Violenté et qui n’est pas en capacité de réagir, ni même de comprendre. Il est petit, et dépendant des adultes. Il ne peut que subir. Il se fige et toute l’énergie de colère et de peur est enfouie, loin, profond. C’est une question de survie : il ne peut ni fuir, ni combattre. Il a parfois essayé, mais les choses ont empirées. La Brute est née de cette colère, de cette peur, de cette impuissance. Et elle a été abandonnée dans la cave.
En devenant adulte, la colère et la peur sont toujours là. Et Gilles continue d’ailleurs à accroitre son stock à la cave, en acceptant l’inacceptable de son employeur, ou d’un soit disant ami qui lui emprunte de l’argent sans jamais lui rendre. Il accumule aussi de la colère et de la peur dans sa relation avec sa compagne : elle l’agace avec son hypocondrie mais il ne le montre jamais. Il a peur qu’elle le quitte, qu’elle découvre le pot aux roses. La Brute se sent coupable : elle n’a pas le droit d’être ainsi en colère ou d’être apeurée. Mieux vaut qu’elle reste planquée. A moins qu’un jour, à bout, elle ne remonte l’escalier, pour exploser.
Le Bon, La Brute et Le Truand, bras dessus, bras dessous
Vous l’avez surement senti venir, la thérapie ne visera pas à régler son compte au Truand, contrairement aux vœux du Bon en début de thérapie. En tout cas pas dans mon cabinet.
Si tout se passe bien, La Brute sera rassurée et déculpabilisée. La peur et la colère vont pouvoir se transformer en énergie utilisable, en diamant taillé. Le Bon et Le Truand vont faire la paix et trouver une synthèse, une façon d’avancer ensemble avec La Brute, bras dessus, bras dessous, vers un monde tout nouveau.
(1) – Gilles est un prénom d’emprunt. Le cas « Gilles » est une construction à partir de plusieurs clients et des détails ont été changés, afin de le rendre totalement anonyme.
Et si vous voulez de l’aide pour transformer votre western intérieur en comédie, n’hésitez pas à venir me rencontrer.
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